Il y a quelques jours, l’association « Agir pour la sauvegarde de Bry » a publié dans sa lettre d’information n°18 un billet intitulé « Que penser du Grand Paris ». Vous le savez, depuis 4 ans je vous ai livré à plusieurs reprises mon scepticisme sur ce projet urbanistique démesuré et particulièrement inadapté aux urgences du moment, en terme de transport notamment. C’est donc afin d’en débattre que je publie aujourd’hui cet article de son Président, Emmanuel Copin, d’autant que dans notre mouvement politique nous partageons totalement son diagnostic et ses réflexions!
Que penser du Grand Paris ?
Les transports en commun parisiens ont conscience d’avoir accumulé un important retard. Il est facile maintenant d’incriminer le « tout automobile », cette politique qui a absorbé pendant des décennies l’essentiel de l’effort budgétaire et de s’en indigner, comme nous l’avons entendu. Il aurait fallu y songer avant. Les conditions éprouvantes des déplacements dans la région parisienne montrent combien les décideurs ont jusqu’à présent fait fausse route (sans jeu de mots). C’est donc un gigantesque effort d’aménagement du territoire qui est attendu de l’Etat et des collectivités locales autour du projet du Grand Paris, lancé en 2007. Rattraper le temps perdu en quelque sorte… Le pourront-ils ? Avant de se le demander, il semble utile de faire le point sur
les ambitions du Grand Paris.
Cette volonté de faire de Paris une ville mondiale, dans le but avoué de concurrencer Londres, tourne le dos à
des décennies de combat mené, au contraire, en faveur d’un rééquilibrage interne du territoire français. Le
déséquilibre entre Paris et la province ne date pas d’hier. C’est même depuis des siècles une caractéristique de
notre pays, marqué par une puissante centralisation. L’agglomération parisienne est devenue progressivement cette mégapole immense qui compte dix millions d’habitants, et même douze avec ses espaces périurbains de plus en plus étendus. D’où le constat de « Paris et le désert français », pour reprendre le titre évocateur d’un ouvrage célèbre, datant de 1947.
Car il faut bien se rendre à l’évidence : Paris a comme stérilisé la vie provinciale, telle une pompe aspirante. D’où les décisions de créer des régions en France, en 1955, par regroupement des départements, et de décentraliser le territoire en 1982, cadres indispensables à une action régionale. Des progrès ont été réalisés dans le sens d’un rééquilibrage, au point de parler d’une « revanche du Sud », pour reprendre le titre d’un autre livre paru en 1987. Le modèle étant clairement l’espace rhénan, caractérisé par un réseau de villes de taille comparable, pouvant ainsi s’épauler et structurer harmonieusement le territoire, au lieu d’être écrasées par un mastodonte.
Le projet du Grand Paris remet brutalement en question cette évolution… avec à la clef recentralisation du territoire par augmentation du poids déjà excessif de la capitale et donc accentuation de son hypertrophie. Entre la capitale et la deuxième agglomération française, à savoir Lyon, le rapport de taille est déjà de 1 à 7, distorsion qui ne s’observe dans aucun autre pays européen. Outre le fait que cela ne peut qu’indisposer la province de voir la plupart des investissements revenir sur la seule région parisienne, au détriment de la mise en valeur de leurs villes, cela ne nous arrange guère à Bry.
Car cela revient à voir le nombre d’habitants croître encore et toujours, et assister à l’envol du prix des logements, tant en location qu’à l’achat, et, pour refermer la boucle, en matière de déplacements, voyager dans des conditions encore plus dégradées, et précisément dans les transports en commun.